Audit mois (juin 1551) se leva à Lyon un tas de menu peuple ramassé hérétiques, lesquels commencèrent à faire monopoles et conventicules et assemblées de trois ou quatre cents personnes, tant hommes que femmes, portant lesdits hommes épées et armes, et chantaient tous ensemble, tant grands que petits, les psaumes de David traduits par Clément Marot, le tout en scandale et blasphème de Dieu et de sa sainte église catholique..., en moquerie et opprobre des ministres et serviteurs d'icelle, et pour attirer à leur damnable secte plusieurs autres gens. A quoi furent faites défenses grandes et expresses de ne plus chanter lesdits psaumes et de ne faire aucune assemblée et conventicule. Et ce néanmoins lesdits malins n'y désistèrent de leurs méchancetés et obstination, par quoi fut ordonné grand guet par la ville et en furent pris au moins d'iceux qui furent mis en prison, attendant nouvelles et bon plaisir du Roi pour savoir ce qu'on en devrait faire. Chronique lyonnaise de Jean Guéraud, 1536-1562, publiée par Jean Tricou, Lyon, Audin, 1929. Cité in Histoire du Lyonnais par les textes, p. 72 |
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Le mardi 16e jour de mai 1553 furent brûlés cinq hérétiques qui se disaient être de Lausanne, qui avaient été entretenus longuement en cette ville aux prisons par ceux de Berne, lesquels les pensaient bien sauver. Et furent brûlés sur les fossés du marché aux pourceaux tous cinq ensemble à trois heures après midi, lesquels moururent en si grande obstination en leurs malhenotes et folies que beaucoup de peuple et autres louangèrent une bien grande constance. Chronique lyonnaise de Jean Guéraud, 1536-1562, publiée par Jean Tricou, Lyon, Audin, 1929. Cité in Histoire du Lyonnais par les textes, p. 72 |
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CALVIN REPROCHE AUX PROTESTANTS LEURS VIOLENCES ET LEURS PILLAGES (Genève - 13 mai 1562) Très chers frères, il y a déjà longtemps que nous avons attente de vos lettres pour avoir occasion, en vous répondant, de nous décharger de ce qui nous pèse fort sur le coeur. Mais, depuis le changement qui est advenu à Lyon, nous n'avons point reçu un seul mot, ni de vous ni de la compagnie des anciens, ce qui nous fait penser qu'il y a du désordre beaucoup, vu que nous sommes sollicités d'aucuns de secourir à votre église, et que vous n'en faites nul semblant. Même, quand le sieur Jérôme Desgouttes passa naguère ici, combien qu'il requît qu'on envoyât des ministres pour vous aider, il déclara qu'on ne lui avait donné nulle lettre. Cependant nous oyons des nouvelles qui nous causent grande angoisse. Nous savons bien qu'en telles émotions il est difficile de se modérer si bien qu'il ne s'y commette de l'excès, et nous excusons facilement si vous n'avez tenu la bride si raide qu'il eût été à souhaiter. Mais il y a des choses insupportables dont nous sommes contraints vous écrire plus âprement que nous ne voudrions. Nous serions traîtres à Dieu, et à vous et à toute la chrétienté cri dissimulant ce que vous orrez ici à notre grand regret. Ce n'est pas un acte décent qu'un ministre se fasse soldat ou capitaine. Mais c'est beaucoup pis quand on quitte la chaire pour porter les armes. Le comble est de venir à un gouverneur de ville le pistolet à la main, et le menacer en se vantant de force et violence ; car voici les mots qu'on nous a récités et que nous avons entendus par témoins dignes de foi : « Monsieur, il faut que vous le fassiez, car nous avons la force en mains ». Nous vous disons rondement que ce propos nous a été cri horreur comme un monstre. Nous avons aussi fort détesté la criée qui a été faite de par le gouverneur et les ministres... Encore n'étant pas assez, si on n'eût couru les champs pour lever butin et pillage des vaches et autre bétail, voire depuis que M. le baron des Adrets est là arrivé avec autorité, lequel n'a point approuvé telles insolences, dont ceux qui se vantent d'être ministres de la parole de Dieu n'ont point eu honte de se mêler. Maintenant, ces vieilles plaies nous ont été rafraîchies quand nous avons oui que les rapines qu'on avait tirées de l'église de Saint-Jean avaient été exposées en vente au dernier offrant et dépêchées pour cent-douze écus. Même qu'on a promis aux soldats de leur en distribuer à chacun sa portion. Vrai est que Monsieur Ruffi est nommément chargé de toutes ces choses, que nous ne pouvons ouïr sans grande honte et amertume de coeur. Or, combien qu'il soit tard d'y remédier, si ne pouvons-nous pas nous tenir de vous prier au nom de Dieu, et exhorter, en tant qu'en nous est, que vous mettiez peines à récompenser les fautes passées, et surtout dépêcher toutes ces voleries et pillages. Car plutôt il faudrait quitter telles gens et s'en séparer que d'exposer l'Évangile en telle opprobre en s'accouplant avec eux. Déjà il y a du zèle inconsidéré à faire les ravages qu'on a faits aux temples. Mais de ce qui s'est fait à la chaude et par quelque dévotion, les gens craignant Dieu n'en jugeront point à la rigueur. De ces butins, que pourra-t-on dire A quel titre sera-t-il licite de ravir ce qui n'est à aucune personne privée ? Si les larcins sont punissables, c'est double crime de dérober le bien public. Par quoi, si vous ne voulez être haïs et détestés de tous gens de bien, mettez ordre que telles offenses se réparent. Car, si vous tardez plus, nous craignons bien que vous n'y veniez jamais à temps. En quoi nous prierons Dieu qu'il vous guide d'esprit de prudence, vous adresse en toute équité et droiture, vous fortifie de constance et vertu, afin que la peine que vous prenez ne soit pas inutile, mais que votre doctrine fructifie à ce que son nom en soit glorifié. De Genève, ce 13e de mai.
Corpus Reformatorum - Vol. XLVII. loannis Calvini Opera... Vol. XIX, Bruschwig, 1879, col.
409-411. |