Quelques analyses supplémentaires

Les rêves des voyageurs. Une chanson.

Figures de style
Peu d'images, de métaphores, de comparaisons -> Cendrars décrit la réalité telle qu'elle est.
Le poème central peut être interprété comme une hallucination auditive de Mme Suter comme la ligne 35 rend compte d'une hallucination visuelle.

Grammaire
Répétition de « il y a », présentatif (l. 1, 10, 12) -> Cendrars insiste sur le fait qu'il présente la réalité telle qu'elle est.
Les phrases courtes créent un rythme haletant, qui fait ressentir l'excitation des passagers.
La seule phrase longue correspond au voyage en train.

Rythmes et sonorités
L. 18-19 : « de nègres aux membres purulents, un rude chant s'éveille, scandé sur les rythmes du train et braillé par mille voix d'hommes »
L. 31-32 : « La selle est d'or, le mors est d'or et les étriers et les éperons aussi, même les fers de son cheval. »
L 34 : « une mêche de cheveux blancs »

Trois axes possibles

  • Une page d'histoire (Cendrars se pose en historien)
  • Les rêves des passagers et la montée de l'excitation
  • La dégradation progressive d'Anna Suter

Exemple de construction de l'axe 3

  1. Une dégradation physique
    1. l'évanouissement et la syncope (cette dernière n'est pas nommée, mais décrite ; Cendrars n'emploie pas le terme médical, il relate (« son coeur a cessé de battre »). On peut remarquer que la formule, telle qu'elle est écrite, pourrait aussi bien désigner la mort
    2. la « mêche de cheveux blancs » (avec l'allitération en "ch")
    3. le tremblement physique (insistance par la répétition et le pléonasme, un tremblement étant par définition « physique »)
  2. Une dégradation mentale
    1. Le texte étant entièrement rédigé en suivant le point de vue d'Anna Suter, cette détérioration n'est pas explicite ; néanmoins...
    2. la dégradation physique en constitue une manifestation extérieure
    3. la détériortation mentale provient manifestement de la peur qu'éprouve le personnage (expliquer « les deux seules femmes », « tient sa fille étroitement enlacée » et la phrase suivante, « affreux Canaques qui font peur » )
    4. Anna Suter n'a pas seulement peur, elle est également choquée moralement (sa syncope survient après la description de la vie « immorale » sur le territouire imaginaire dirigé par son mari ; même si elle trouve les Canaques « affreux », elle les plaint d'être « horriblement maltraités » .
    5. On imagine que la folie la gagne à travers ce que l'on peut imaginer être deux hallucinations, l'une auditive (le chant de la locomotive) et l'autre visuelle (le soleil « comme une pêche fondante »)
  3. Finalement le texte s'achève sur un vide (une négation et le verbe disparaître, dont on sent qu'il va happer ce qui reste de santé et de raison à Mme Suter